Dans le cadre du renforcement de la compétitivité et de la résilience de l’économie togolaise, le Bureau de Restructuration et de Mise à Niveau des Entreprises (BRMN-Togo) accompagne les entreprises dans leur transformation. Pour mieux appréhender ce processus, Madame Kanko Mawulawoè SALLAH, Directrice du BRMN-Togo, apporte un éclairage sur la mise en œuvre des actions de restructuration et de mise à niveau des entreprises togolaises.
L’économiste du Togo : Pouvez-vous nous présenter brièvement le rôle et les missions principales du Bureau de Restructuration et de Mise à Niveau des Entreprises (BRMN Togo) ?
Mme Kanko Mawulawoè SALLAH : Le BRMN a pour mission la mise en œuvre et le suivi du Programme National de Restructuration et de Mise à Niveau (PNRMN). Ce programme vise à accompagner les unités industrielles togolaises afin qu’elles répondent aux nouvelles orientations gouvernementales et saisissent les opportunités économiques actuelles de renforcement de leur compétitivité et de leur productivité.
A ce titre, il est chargé, entre autres, de : i) assurer le suivi de l’exécution des plans de mise à niveau et la promotion du Programme, ii) gérer le système d’information du PNRMN, et iii) assurer la gestion des relations avec les prestataires de services et sous-traitants recrutés dans le cadre de ses activités.
Comment le BRMN Togo est-il structuré et quels sont les principaux organes de décision ?
Le BRMN est sous la tutelle du ministère chargé de l’industrie. Son fonctionnement est supervisé par un Comité de Pilotage National (CPN), qui regroupe des représentants de l’administration publique, des organisations patronales et des institutions financières.
Le CPN définit les orientations stratégiques et aide l’Etat à concevoir et à mettre en œuvre la politique de restructuration et de mise à niveau des entreprises.
Dans le cadre de ses missions, le CPN : i) anime la concertation entre les divers acteurs impliqués dans le Programme, ii) définit les entreprises cibles, les modalités et les critères d’intervention du Programme, iii) administre les ressources financières, et iv) organise le suivi et l’évaluation des performances du dispositif.
Le Bureau dont les attributions sont définies plus haut, quant à lui, est dirigé par un Directeur.
Quelles sont les principales synergies que vous entretenez avec d’autres institutions publiques et privées dans le domaine de la restructuration et de la mise à niveau des entreprises ?
La mise en œuvre du PNRMN repose sur l’implication de plusieurs parties prenantes pour assurer le succès du programme, notamment les institutions publiques, le secteur privé, les institutions financières et les partenaires techniques et financiers. Cette synergie permet de mobiliser les expertises, les ressources et les mécanismes de financement nécessaires pour accompagner efficacement les entreprises dans leur processus de restructuration et de mise à niveau.
Quel est l’état d’avancement actuel du Programme National de Restructuration et de Mise à Niveau (PNRMN) ?
Le PNRMN, adopté en 2013, a été actualisé en 2024 avec la définition de nouveaux objectifs afin de mieux répondre aux nouvelles orientations gouvernementales.
Le PNRMN actualisé propose des solutions pratiques et durables pour renforcer le secteur industriel. Il participe à la concrétisation de l’axe 1 de la feuille de route gouvernementale qui vise à « dynamiser la création d’emplois en s’appuyant sur les forces vives de l’économie » et plus spécifiquement à son ambition 3 qui entend « créer de véritables industries extractives et transformatrices ».
Quelle est la population cible du PNRMN ?
La cible du PNRMN est essentiellement constituée, à date, de TPME formelles et informelles de transformation évoluant dans les domaines prioritaires de l’Etat. Il s’agit essentiellement de :
Nano-Entreprises dont le chiffre d’affaires annuel hors taxe est inférieur à 5 millions de francs CFA avec 01 employé permanent.
Micro-Entreprises qui emploient en permanence moins de 10 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel hors taxe est supérieur ou égal à 5 millions de francs CFA et inférieur à 30 millions de Francs CFA.
Petite-Entreprises disposant d’un effectif permanent supérieur ou égal à 10 et inférieur à 50 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel hors taxe est supérieur ou égal à 30 millions et inférieur à 150 millions de francs CFA.
Moyenne-Entreprises disposant d’un effectif permanent supérieur ou égal à 50 et inférieur à 200 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel hors taxe est supérieur ou égal à 150 millions et inférieur à 1 milliard de francs CFA.
Toutefois, le PNRMN ambitionne d’accompagner les grandes entreprises industrielles togolaises, dans les années à venir.
Quels sont les critères d’éligibilité au PNRMN ?
Les critères d’éligibilité au PNRMN sont les suivants :
Adhésion volontaire du chef d’entreprise au programme.
Existence et activité depuis au moins deux ans.
Enregistrement auprès du Centre de Formalités des Entreprises (CFE).
Statut d’entreprise de droit togolais, avec des capitaux nationaux ou étrangers.
Absence de liquidation ou de procédure de règlement judiciaire en cours.
Activité dans le secteur industriel ou dans un secteur retenu par le programme.
Présentation d’états financiers certifiés par un commissaire aux comptes ou un Centre d’Appui.
Engagement à respecter les conditions du processus de mise à niveau.
Quelles sont les réalisations concrètes de ce programme et quels sont les objectifs pour 2025 ?
A date, en termes de réalisations, le BRMN a appuyé plusieurs TPME industrielles dans la modernisation de leurs équipements, améliorant ainsi leur capacité de production.
Le programme a facilité l’accès des entreprises aux financements nécessaires pour leurs projets de développement, grâce à des partenariats avec des institutions financières locales et internationales. De nombreux employés ont bénéficié de formations techniques et managériales, renforçant les compétences au sein de leurs entreprises.
Concrètement, à ce jour, le Bureau a accompagné 69 entreprises, formés 40 consultants aux méthodologies de la mise à niveau des entreprises et 115 entreprises ont adhéré au Programme National de Restructuration et de Mise à Niveau.
En 2025, le BRMN Togo vise à :
Accompagner au moins 20 TPME industrielles dans le cadre des diagnostics stratégiques, l’élaboration et la mise en œuvre des plans de mise à niveau ;
Accélérer la transformation numérique en intégrant des outils digitaux et en favorisant l’innovation ;
Faciliter l’accès aux financements en développant des partenariats avec les institutions financières ;
Renforcer les capacités des entrepreneurs à travers des formations ciblées et un accompagnement personnalisé ; et
Optimiser le suivi-évaluation pour mesurer les impacts et ajuster les stratégies d’intervention.
Comment évaluez-vous l’impact de ces initiatives sur la performance et la compétitivité des entreprises togolaises ?
L’impact des initiatives du BRMN sur la performance et la compétitivité des entreprises togolaises se traduit par plusieurs avancées significatives :
l’amélioration de la productivité et des performances financières ;
le renforcement des capacités managériales et techniques ;
l’accès aux financements et aux marchés ; et
la conformité aux normes de qualité et aux exigences environnementales.La première session du Comité de Pilotage s’est tenue le 13 février 2025, de quoi avez-vous débattu au cours de cette session ?
Le Comité de Pilotage du BRMN a effectivement tenu sa toute première session de l’année, le 13 février 2025. Il s’agissait d’abord de faire le bilan des activités réalisées en 2024, ensuite d’étudier et d’adopter celles prévues pour 2025 ainsi que le budget associé.
Cette première session ordinaire du Comité de pilotage a été également l’opportunité d’échanger avec les membres sur les pistes d’amélioration de l’accompagnement offert par le BRMN.
Pouvez-vous détailler le plan de travail du BRMN pour 2025 tel qu’il a été validé lors de cette session ?
Pour cette année 2025, le plan de travail se focalise principalement sur : i) la mise en place des mécanismes d’incitations et d’encouragement, ii) le renforcement des organes de gestion, de coordination et de suivi, iii) la réalisation de pré-diagnostics et diagnostics approfondis assortis de plans de mise à niveau et de plans d’affaires et iv) la recherche de partenaires techniques et financiers adéquats. Toutes ces actions visent à de fournir un accompagnement répondant aux besoins spécifiques des entreprises.
Quelles sont, selon vous, les principales mesures qui permettront de renforcer l’accompagnement des entreprises dans leur mise à niveau et restructuration ?
Le renforcement de l’accompagnement des entreprises passe par un accès facilité au financement, des formations ciblées et un accompagnement personnalisé basé sur des diagnostics approfondis. Le BRMN devra intensifier ses partenariats avec les institutions financières et techniques pour offrir un soutien global. Un suivi rigoureux et une adaptation continue des interventions garantiront une mise à niveau efficace. Enfin, l’innovation et la transformation numérique seront essentielles pour améliorer la compétitivité et l’accès aux marchés.
Quels sont les défis majeurs auxquels le BRMN Togo devra faire face dans les prochaines années ?
Le BRMN-Togo devra surmonter plusieurs défis majeurs afin de renforcer la compétitivité des entreprises et assurer leur adaptation aux évolutions du marché. Ces défis se déclinent en trois (3) axes principaux :
L’intégration dans la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAf) : l’ouverture des marchés impose aux entreprises togolaises une mise à niveau stratégique. Le BRMN devra les accompagner dans cette transition pour maximiser les opportunités offertes par la ZLECAf à travers le respect des normes et qualités des produits;
la transition numérique et l’innovation technologique : La digitalisation et l’innovation sont devenues des leviers essentiels de compétitivité. Le BRMN devra soutenir les entreprises dans leur modernisation et leur transition vers des outils technologiques adaptés.
Enfin, les exigences environnementales et le développement durable prennent une place croissante dans les stratégies économiques. Le BRMN devra aider les entreprises à adopter des pratiques écoresponsables et à répondre aux nouvelles normes environnementales pour assurer leur pérennité.
Quelles actions supplémentaires envisagez-vous pour optimiser l’efficacité de l’accompagnement et la mise à niveau des entreprises ?
Pour optimiser l’accompagnement et la mise à niveau des entreprises, le BRMN envisage de :
renforcer les partenariats stratégiques avec les institutions financières, les centres de recherche et les organisations internationales ;
plaider pour la création d’un fonds de restructuration et de mise à niveau pour financer les investissements stratégiques nécessaires à la modernisation et à la compétitivité des entreprises ;
instaurer un suivi et une évaluation rigoureux en temps réel pour ajuster rapidement les interventions en fonction des résultats obtenus.
Comment voyez-vous l’évolution du secteur industriel et économique togolais dans le cadre des réformes engagées par le gouvernement ?
L’évolution du secteur industriel et économique togolais s’inscrit dans une dynamique de transformation portée par les réformes engagées par le gouvernement. L’amélioration du climat des affaires, l’optimisation du cadre réglementaire et le renforcement des infrastructures favorisent l’émergence d’un tissu industriel plus compétitif. L’intégration à la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAf) ouvre de nouvelles perspectives pour les entreprises locales, tandis que la promotion de l’innovation et de la technologie est un levier stratégique pour accroître la productivité.
Dans cette optique, le Togo, dans les 10 années à venir, serait un pays doté d’un secteur industriel diversifié et compétitif. Toutefois, la réussite de ces réformes nécessitera un accompagnement soutenu des entreprises, notamment en matière de financement et de renforcement des compétences.
À votre avis, quel rôle le renforcement des capacités des entreprises joue-t-il dans la compétitivité globale de l’économie togolaise ?
L’économie Togolaise étant une économie ouverte, il est nécessaire que les premiers acteurs de la création de valeur que sont les entreprises s’adaptent aux évolutions du marché ; ceci à travers l’amélioration de la gestion et de l’organisation, qui sont des facteurs de renforcement de capacités des entreprises. Des entreprises plus performantes généreront davantage de richesse, renforçant ainsi la compétitivité de l’économie togolaise.
Comment les initiatives du BRMN contribuent-elles à une croissance économique durable et à l’inclusion des TPME dans l’économie nationale ?
Les initiatives du BRMN contribuent à une croissance économique durable en accompagnant les TPME dans leur modernisation et leur structuration. Grâce aux actions de conseil, de suivi et de mise à niveau, ces entreprises améliorent leur compétitivité et renforcent leur capacité à s’intégrer aux chaînes de valeur locales, régionales et internationales. En favorisant leur développement, le BRMN leur permet de jouer un rôle clé dans les projets de développement national, par la création des emplois décents et la stimulation de l’économie togolaise de manière inclusive et durable.
Quelles recommandations feriez-vous aux décideurs pour garantir le succès de la mise en œuvre du PNRMN à l’échelle nationale ?
Pour garantir le succès de la mise en œuvre du PNRMN à l’échelle nationale, il est essentiel de renforcer la synergie entre les différentes institutions d’accompagnement des entreprises. Une meilleure coordination permettra d’optimiser les interventions et d’assurer une complémentarité des actions. Par ailleurs, l’accès au financement demeure un enjeu majeur. La mise en place d’un fonds dédié à la restructuration et à la mise à niveau des entreprises faciliterait la réalisation des investissements nécessaires à leur transformation.
Il est également crucial de développer un dispositif d’orientation efficace afin que chaque entreprise, en quête d’accompagnement, puisse être dirigée vers la structure la plus adaptée à ses besoins spécifiques.