Lomé a accueilli, le samedi 29 novembre, la compétition nationale de hacking éthique Capture The Flag 2025. Pendant vingt-quatre heures, sans pause ni répit, de jeunes passionnés de cybersécurité ont enchaîné les défis techniques. L’objectif est de tester leur limite, déjouer des attaques fictives et prouver que le pays dispose désormais d’un vivier solide en matière de sécurité numérique. Cette édition, plus relevée que celle de 2024, a révélé une montée de niveau que l’Agence nationale de la cybersécurité (ANCy) ne cache plus.
L’équipe 1ntrud3rs, cinquième l’an dernier, a décroché la première place avec 13 921 points. À égalité, FireTeam s’installe au deuxième rang, tandis qu’APT17, absente en finale en 2024, complète le podium avec 11 514 points. Ces performances confirment l’évolution du paysage togolais de la cybersécurité. Pour Abdoulaye Abiboulaye, membre de 1ntrud3rs et étudiant en cybersécurité à Ipnet Institute of Technology, la compétition « permet de faire face aux défis réels de la cybersécurité et de se préparer pour les défis du numérique dans la vie quotidienne pour rendre justice aux victimes ».
Cette montée en puissance n’est pas un hasard. Le directeur général de l’ANCy, le Commandant Gbota Gwaliba, souligne un changement notable : « Nous avons rehaussé le niveau des défis et nous remarquons que le niveau des candidats a suivi. Au départ, nous étions obligés de faire appel à beaucoup de prestataires étrangers. Mais désormais, la compétence commence par monter petit à petit et notre bras technique, Cyber Defense Africa, recrute aujourd’hui au cours de ces compétitions qui sont aussi l’occasion de détecter les talents. »
Même son de cloche chez Koffi Kallern Atter, du groupe APT17, qui reconnaît la difficulté accrue du challenge. Pour lui, l’intelligence artificielle a joué un rôle clé : elle a « permis d’optimiser notre démarche et de nous retrouver lors de certains défis de la compétition ». Preuve que le secteur évolue et que les candidats maîtrisent mieux les outils modernes.
Cette édition a battu un autre record : 360 candidats ont franchi la première étape, contre moins de 200 en 2024. Une progression forte qui révèle l’intérêt grandissant des jeunes pour la cybersécurité, un domaine stratégique et porteur d’emplois.
Le CTF n’est pas qu’un concours. Pour l’ANCy, c’est un levier stratégique pour préparer la défense numérique du Togo. Les scénarios sont variés : hacking d’une banque fictive, attaque en déni de service, vol de données sensibles… Tous ces défis plongent les candidats dans un environnement proche de la réalité. Le Commandant Gwaliba insiste : il faut que les jeunes « comprennent, lorsqu’ils se retrouveront en entreprise, par quel process les cybercriminels opèrent ». C’est la condition pour qu’ils puissent ensuite proposer les bonnes politiques de sécurité, les bonnes normes et les meilleures pratiques.
Cette immersion fait du CTF un véritable terrain d’entraînement national. L’Agence s’en sert aussi pour fédérer une communauté. Les jeunes participants sont invités à rejoindre un réseau actif de cyberspécialistes, formé et coordonné par l’ANCy. L’objectif est de bâtir une génération capable de défendre l’écosystème numérique du pays.
La participation féminine, encore faible, devient une priorité. Le commandant Gwaliba a appelé les jeunes filles à s’intéresser davantage au domaine. L’ANCy souhaite en faire des ambassadrices auprès d’autres étudiantes pour encourager l’engagement féminin dans ce secteur stratégique.
Cette volonté de motiver et d’encourager se traduit aussi dans les prix. Pour l’édition 2025, l’ANCy a revalorisé les récompenses. Le premier lauréat repart avec 2 millions de FCFA. Le second reçoit 1,2 million, et le troisième 800 000 francs. L’unique participante de la compétition a bénéficié d’un prix spécial de 100 000 francs, en signe d’encouragement. Tous les participants ont également reçu une enveloppe symbolique de 50 000 francs.
Ces gestes marquent la volonté de l’État de soutenir les efforts des jeunes talents. C’est aussi une manière de montrer que la cybersécurité est un domaine stratégique, où performance et engagement sont reconnus et valorisés.
Pendant 24 heures intenses, les finalistes ont jonglé entre stress, fatigue et créativité. Ils ont affronté des vulnérabilités imaginaires d’un réalisme saisissant. Ce marathon technique a révélé une génération capable d’agir vite, d’adopter les bons réflexes et de trouver des solutions ingénieuses.
Pour l’ANCy, c’est un signe prometteur. Le pays peut compter sur une « armée » de jeunes talents qui se préparent à défendre l’espace numérique national. L’Agence s’engage à les accompagner avec des formations certifiantes, afin de renforcer leurs compétences et de faire d’eux des sentinelles capables de prévenir et contrer les attaques.
Le CTF 2025 confirme une tendance fort : le Togo prend au sérieux sa cybersécurité et peut compter sur une jeunesse motivée, inventive et de plus en plus compétente. En élevant le niveau du concours, l’ANCy pousse les candidats à se dépasser. En retour, les performances enregistrées montrent que la relève est là. Une relève prête à protéger les infrastructures numériques du pays. Une relève qui, à travers ce concours, s’affirme comme un maillon essentiel de la défense numérique nationale.
Dieudonné A.