Les dirigeants africains se réunissent samedi et dimanche pour le sommet annuel de l’Union africaine (UA) avec pour objectif d’accélérer la mise en place de la zone de libre-échange, dans un contexte marqué par les répercussions de la guerre en Ukraine et la persistance des insurrections armées.
Depuis de nombreuses années, les dirigeants du continent échangent sur la mise en oeuvre de la zone de libre-échange continentale africaine (Zlec), qui doit réunir 1,3 milliard de personnes et ainsi devenir le plus grand marché mondial avec un PIB combiné de 3.400 milliards de dollars, selon l’ONU.
Ce 36e sommet de l’UA, qui se tiendra au siège de l’organisation continentale à Addis Abeba, portera sur «l’accélération» de la Zlec. Initialement, le marché devait être effectif dès le 1er juillet 2020. Mais la fermeture de la plupart des frontières à cause de la pandémie de coronavirus a repoussé le calendrier.
Divergences
Pour l’heure, le commerce intra-africain ne représente que 15% des échanges totaux du continent.
«Il y a une volonté politique affichée et affirmée (concernant la zone de libre-échange) mais cela va être long à mettre en place», affirme à l’AFP Paul-Simon Handy, directeur du bureau de l’Institute for Security Studies à Addis Abeba. La Zlec doit, selon ses promoteurs, favoriser le commerce au sein du continent et attirer des investisseurs. Selon la Banque mondiale, d’ici 2035, l’accord permettrait de créer 18 millions d’emplois supplémentaires et «pourrait contribuer à sortir jusqu’à 50 millions de personnes de l’extrême pauvreté».
Mais des divergences demeurent sur le continent.
«Il y a des pays qui sont un peu hésitants sur certains points, notamment sur le protocole de libre circulation des personnes et des biens.
Certains pays africains craignent que l’ouverture des frontières n’entraîne un afflux de personnes qu’ils ne peuvent pas contrôler», souligne Dorine Nininahazwe, directrice de l’ONG ONE pour l’Afrique de l’Est, évoquant également des questions de protectionnisme. Tous les pays de l’UA, à l’exception de l’Erythrée, y ont adhéré, mais les discussions achoppent sur le calendrier des réductions des droits de douane, notamment pour les pays les moins développés.
Economies en difficulté
Ce sommet «va se tenir à un moment particulièrement délicat pour le continent», souligne par ailleurs l’organisation International Crisis Group.
«L’invasion de l’Ukraine et les sanctions internationales ont ébranlé les économies africaines et plongé nombre d’entre elles dans de graves difficultés», poursuit l’ICG. Si le continent reste toujours le théâtre d’affrontements armés, notamment dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) ou dans le bassin du lac Tchad, l’un des conflits les plus meurtriers au monde, la guerre au Tigré (nord de l’Ethiopie) – qui a fait plusieurs centaines de milliers de morts selon l’UA – a pris fin en novembre dernier, avec la signature d’un accord de paix sous l’égide de l’Union africaine.
Azali Assoumani, président des Comores, petit archipel de l’océan Indien d’environ 850.000 habitants, doit prendre la présidence tournante de l’UA, à la suite de Macky Sall, le chef de l’Etat sénégalais.
Le président comorien «aura besoin du soutien d’autres dirigeants africains pour assumer son mandat, compte tenu du poids diplomatique limité du pays», note l’ICG tandis que Paul-Simon Handy souligne que le choix s’est fait en novembre, «lui laissant peu de temps pour se préparer».
Le Mali, le Burkina Faso et la Guinée, trois pays dirigés par des militaires issus de coups d’Etat, ont demandé le 10 février la levée de leur suspension de l’UA. Mais «la réintégration de ces juntes au sein de l’UA serait un renoncement total», selon M. Handy.
Au moins 35 présidents et quatre Premiers ministres participeront au sommet, selon le gouvernement éthiopien.