Le 11 décembre 2025 à New Delhi, l’UNESCO a officiellement inscrit « La prise de la pierre sacrée ou les rites du nouvel an en pays Guin au Togo », encore appelé EKPESOSO, sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
La reconnaissance internationale, portée par une délégation togolaise et soutenue par plusieurs institutions nationales, marque une avancée majeure dans la valorisation du patrimoine culturel immatériel du pays. La décision d’inscription est intervenue lors de la 20ᵉ session du Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Le Togo y était représenté par une forte délégation conduite par M. Kpayé K. Bakayota, Directeur de cabinet du Ministère du Tourisme, de la Culture et des Arts. Cette reconnaissance constitue le troisième élément togolais inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité, après le genre oral Gèlèdè et la Maïeutique : connaissances, savoir-faire et pratiques, tous deux issus de candidatures multinationales. L’inscription d’EKPESOSO est le fruit d’un long processus. L’Académie du Guingbé et des savoirs endogènes guin et mina a initié la procédure, avant d’être accompagnée techniquement par la Direction du patrimoine culturel pour le montage du dossier. Celui-ci a été soumis en février 2024 au secrétariat de la Convention de 2003. Le travail d’évaluation s’est déroulé entre décembre 2024 et octobre 2025, aboutissant à une approbation unanime. Cette réussite repose également sur l’appui institutionnel de la Délégation permanente du Togo auprès de l’UNESCO à Paris et de la Commission nationale togolaise pour l’UNESCO à Lomé. Ensemble, les acteurs ont permis au dossier de répondre au strict respect des cinq critères d’inscription exigés par l’Organisation. EKPESOSO, rite majeur dans la tradition Guin, constitue une étape essentielle du processus rituel d’entrée dans la nouvelle année, Epé Ekpé. Il s’insère dans un ensemble de phases cérémonielles incluant le Sédodo (décret des interdictions), Situtu (purification), Montata (aplanissement de la voie), Bli Kumama (distribution du maïs), Tchessidodo (préparation de l’eau de purification), ou encore Nlowa Nagbé, célébration proprement dite du nouvel an Guin.
Fierté, visibilité et nouveaux défis
Avec EKPESOSO, le patrimoine culturel Guin acquiert une dimension universelle. L’inscription confirme que ce rite ancestral, jusque-là propriété culturelle de la communauté Guin, devient désormais un héritage commun de l’humanité. Elle renforce la visibilité internationale de ce patrimoine et favorise la prise de conscience de l’importance du patrimoine immatériel dans le dialogue entre les peuples. Au niveau national, EKPESOSO a déjà bénéficié d’un inventaire et d’un classement. Désormais reconnu au plan international, il profite d’une protection renforcée impliquant non seulement la communauté détentrice, mais aussi l’État et l’UNESCO. Ce changement d’échelle ouvre des perspectives pour la sauvegarde, la transmission intergénérationnelle, la valorisation et la conservation du rite. L’après-inscription représente un chantier important. Il faudra notamment : élaborer un plan de sauvegarde dédié ; intégrer le patrimoine inscrit dans les politiques de développement local et national ; renforcer l’appropriation par toute la communauté Guin ; participer activement au rapport périodique soumis tous les quatre ans à l’UNESCO. L’enjeu est de garantir que la reconnaissance obtenue se transforme en projet structurant et durable. Le rite EKPESOSO occupe une place centrale dans l’aire culturelle Guin. Il représente un moment de transition, de renouveau et de cohésion sociale, guidé par des pratiques qui rythment la préparation de la nouvelle année. Le rituel, très structuré, comprend diverses étapes comme l’invocation des ancêtres (Nloli Yogbé), les cérémonies de purification et les processions festives telles que Epkantchontchon ou le Vodudzé Apu, marquant le retour des divinités à la mer.