Face à la menace persistante des médicaments vétérinaires illicites, Lomé accueille cette semaine la 6ᵉ réunion biennale d’information entre la Commission de l’UEMOA, les États membres et les firmes pharmaceutiques vétérinaires.
L’objectif : dresser un bilan sans complaisance du dispositif régional de régulation et repenser les mécanismes pour garantir une meilleure santé animale et, par ricochet, la sécurité alimentaire dans l’espace communautaire.
Présidée par le ministre d’État Yark Damehame, la rencontre s’est ouverte en présence du Commissaire Mahamadou Gado de la Commission de l’UEMOA.
Elle intervient dans un contexte préoccupant : malgré plus de 660 autorisations de mise sur le marché (AMM) délivrées depuis 2006, les produits vétérinaires de contrebande continuent de circuler à grande échelle.
Dans son discours d’ouverture, le Ministre d’Etat a invité, « tous les acteurs de notre espace communautaire à une coopération efficace et une plus étroite collaboration pour mieux appréhender les enjeux afin d’élaborer des stratégies communes, car il s’agit ici d’une exigence non seulement professionnelle, mais surtout économique et de santé publique ».
Le Général Damehame YARK indique que « des résultats appréciables dans l’assainissement du marché du médicament vétérinaire ont été certes obtenus depuis 2014, mais la persistance du phénomène, nous rappelle qu’il reste encore beaucoup à faire pour garantir un environnement pleinement sécurisé et conforme aux normes ».

Il a exhorté les participants à échanger sur les acquis de la réforme des législations pharmaceutiques vétérinaires engagée depuis plus d’une quinzaine d’années au sein de l’UEMOA et à formuler des propositions de solutions aux difficultés rencontrées dans sa mise en œuvre afin d’y remédier.
Le Commissaire Gado, dans son intervention, a rappelé les actions conduites par la Commission de l’UEMOA visant à assurer la qualité des médicaments vétérinaires mis à la disposition des éleveurs de l’espace communautaire pour préserver la santé animale mais aussi celle des populations. Près de 800 millions de FCFA ont été mobilisés par la Commission pour soutenir les Etats membres dans la lutte contre la vente illicite des médicaments vétérinaires dans l’Union et plus de 200 millions de FCFA pour le contrôle post Autorisation de Mise sur le Marché des médicaments vétérinaires homologués en circulation dans l’Union.
Cela s’ajoute aux actions déployées pour le renforcement des capacités des laboratoires en termes de formation sur les méthodes d’analyse et de fourniture des équipements et matériels d’analyse.
« Malgré ces efforts consentis par la Commission de l’UEMOA et les Etats membres, force est de constater qu’une quantité non négligeable de médicaments vétérinaires frauduleux continue de circuler dans l’espace communautaire », a déploré Mahamadou GADO.
Un enjeu pour l’élevage et la santé publique
Dans l’Union, l’élevage pèse jusqu’à 38 % du PIB agricole dans certains pays. Garantir des intrants vétérinaires sûrs et efficaces est donc un enjeu de souveraineté sanitaire et économique. D’où la mise en place, depuis 2010, d’un cadre régional d’AMM centralisé complété par des dispositifs de contrôle qualité et de pharmacovigilance, soutenus par plus d’un milliard FCFA en financements communautaires.
Mais le dispositif montre ses limites. Entre procédures encore lourdes, capacités nationales inégales et résistance d’une partie du secteur privé, la réforme peine à éradiquer les réseaux de distribution illégale.
Vers une régulation plus efficace et plus intégrée
Selon Dr Kouadjo Théodore Domagni, directeur du médicament vétérinaire à la Commission, l’adhésion progressive des firmes pharmaceutiques aux réformes régionales est encourageante. Mais il insiste : « On ne peut pas parler d’élevage sans parler de santé animale, et on ne peut pas parler de santé animale sans médicaments vétérinaires de qualité ».

Cette rencontre, qui se tient à Lomé, ambitionne donc de réviser les procédures de soumission des dossiers AMM, de renforcer les capacités des États membres et de consolider l’engagement des acteurs privés. L’enjeu est de mettre fin à l’anarchie dans la distribution de médicaments vétérinaires et sécuriser durablement les chaînes de valeur de l’élevage dans l’UEMOA.
Cette sixième réunion biennale d’information entre l’Organe exécutif de l’Union, les Etats membres et les firmes pharmaceutiques vétérinaires passera en revue les insuffisances liées au montage des dossiers de demande d’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) des médicaments vétérinaires, les campagnes de contrôle de qualités des médicaments vétérinaires en cours ainsi que les acquis de la réforme sur les législations pharmaceutiques.